« - T’étais où ? »
« - Occupe toi de tes oignons ! »
« - C’est justement ce que je fais, figure toi. »
« - Non non Aidan. Tu m’auras pas à ce petit jeu. »
« - Quand est ce que tu vas laisser tomber ? » soupira Aidan en fixant son meilleur ami. « Elle a tournée la page. Elle va se marier. Et tu n’es pas l’heureux élu. »
« - La date n’est même pas encore fixé. Alors lâche moi les baskets ! » grogna Noam.

Aidan avait toujours le chic pour rentrer dans le vif du sujet et de mettre les pieds dans le plats. Noam ne voulait pas parler de ce qui se passait avec Charly. Ça n’appartenait qu’à eux. C’était des moments volés. Des moments qui était bien trop précieux pour les raconter aux autres. Même s’il comprenait qu’Aidan tentait juste de protéger Charly de lui. Se pinçant les lèvres, il passa près de la camaro de Charly avant de constater qu’elle ne semblait pas avoir bougé depuis plusieurs jours. Un sourire s’étira en grimace en réalisant qu’elle était en panne et qu’elle ne lui avait absolument rien dit. Pourquoi ? Pour ne rien lui devoir ? Parce que leurs priorités étaient ailleurs avec Noaly ? Possible.

« - je comprends pas qu’elle te pardonne si facilement. Tu l’as brisé Noam. Pendant des mois… elle n’était plus que l’ombre d’elle-même. Caleb voulait ta peau- »
« - Ecoute moi, big brother ! » s’arrêta Noam en dévisageant son meilleur ami. « J’ai pas besoin d’un topo sur ces deux années. Je sais ce qu’elle a traversé. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, j’étais tout près. Physiquement j’étais ailleurs… mais en vérité, j’étais toujours dans le coin. J’étais là, le jour de funérailles. Elle était entourée de toi et de Josh. Je vous ais vu. »

Ça l’exaspérait. On essayait toujours de le faire culpabiliser. Lui avait perdu sa sœur qui n’en était pas réellement en une. Et il avait fait une croix sur ses parents adoptifs. De surcroit, il avait découvert qu’il avait une famille biologique à Hope Mills. Qu’ils étaient toujours là. Encore plus étrange,il savait désormais qu’il était l’ainée d’une fratrie. Qu’il devait être le bon exemple, le grand frère. Mais cette histoire était pour le moment reporté dans l’ordre des priorité. Charly et Noaly étaient en haut de la liste et pour rien au monde pour l’instant, il ne se focaliserait sur autre chose.

« - Tu étais là ? Elle le sait ? Vous avez parlé ? »
« - Songe à une carrière dans la police, Aidan. »
« - Très marrant… Mais l’uniforme ne m’irait pas. Réponds. »
« - A un moment donné, Lynn a déteint sur toi. » grommela Noam en jetant un œil à son meilleur ami. « J’ai besoin d’elles et… elles ont besoin de moi. Pour l’instant c’est tout ce qui compte. »
« - Elles ? »
« - Fait pas l’innocent. Tu es au courant… d’ailleurs, c’est à se demander comment cette histoire a pu rester secrète si longtemps. »

Aidan ne pipa mot, se contentant d’avancer lentement vers la voiture de Noam. Aidan avait vu la détresse de Charly chaque jour. Il la voyait souffrir et pourtant, chaque matin elle se levait pour que sa journée ne ressemble pas aux autres. Elle avait travaillé sur elle-même. Et en vérité, tout ce qu’elle avait fait ça n’était pas pour elle. Mais pour cette partie d’elle et de Noam.

« - Et qu’est ce qu’elle t’a dit… plus exactement ? »
« - ça mon pote, ça reste entre elle et moi. »
« - Allez Noam ! Si t’es au courant, c’est plus un secret. Tu peux m’en parler- »
« - Je le ferais surement un jour… mais pas dans l’immédiat. » trancha Noam d’un ton sans réplique.

Aidan voulait l’aider, c’était l’unique raison pour laquelle, il le poussait à se confier. Parce qu’il n’était pas du genre à se livrer de lui-même. Parfois c’était vraiment bon d’avoir un confident et beau frère comme lui. Mais à d’autres reprise, c’était une vraie poisse. Car il était près à tout pour qu’il retrouve son équilibre. D’autant plus lorsque ça consistait à tenir Charly éloigné de lui, pour la propre sécurité de la jeune femme. Aidan ne répliqua pas et en s’approchant de la mustang, Noam rajouta.

« - Dis lui que je passerais ce soir au bar. »
« - C’est tout ? »
« - Oui, c’est tout. Le reste n’implique pas que tu doives être présent. »
« - Oh… Des problèmes vont se profiler à l’horizon… » rit doucement Aidan. Car c’était Charly et Noam. Leur relation n’a jamais été simple et une fois de plus Aidan songea à Lynn, qui dans le fond devait être bien heureuse de voir son frère revenir en ville.

Filant au volant de sa voiture, Noam tentait de ne pas prendre en compte les propos de son meilleur ami. Que savait il réellement de la situation ? Il aurait pu lui parler des évènements qui s’étaient déroulés entre lui et Charly depuis Noël. Il aurait pu lui parler de Noaly. Egoïstement, il gardait ça pour lui. Pour mieux les protégé toutes les deux. Comme le lui avait dit Charly, Aidan faisait partie de sa famille. Le sang n’importait pas, c’était des personnes de confiances, des personnes qu’il aimait. En tant que beau frère et meilleur ami, ne méritait il pas ses confessions ? Bientôt. Bientôt, il lui en parlerait. Lorsque les choses seront plus claires entre lui et Charly.

Près de l’épicerie, il se gara où il devait faire un détour pour quelques courses. Etrangement, si à son retour il avait songé à ne rester à Hope Mills, Noam avait vite déchanter. Sa vie était ici. Près de ses amis mais surtout de Charly et de leur fille. Il avait encore du mal avec cette notion mais le simple fait d’y penser le rendait fier. Il avait une petite fille et il ferait en sorte que tout se passe bien. Qu’elle soit heureuse mais surtout entourée d’amour. Il envisageait même d’aménager l’ancien bureau de l’appartement en chambre. A vrai dire, il avait déjà effectuer quelques travaux. Le strict minimum qui l’occupait afin qu’il ne retombe pas dans sa dépendance. Bientôt la petite pièce ressemblerait à celle d’une chambre d’enfant et il n’y manquerait plus qu’un seul élément : Noaly. C’était avec une idée bien précise qu’il entra dans le magasin lorsqu’il tomba nez à nez avec un caddy et une jeune femme qu’il avait croisé à plusieurs reprises ses derniers temps. Toujours accompagné par un jeune fille d’une dizaine d’année.

« - Hé vous ! » leur sourit il avec amusement. « on vous a jamais apprit à conduire un caddy ? »

Noam n’était pas plus idiot ou plus intelligent qu’un autre mais il pouvait sentir les craintes chez certaines personnes. Dans les regards, on distinguait aisément les craintes les plus courantes. Et pour en avoir vu, Noam savait que ces deux là avait du ou devait en baver sévèrement. Deux pots de peinture sous le bras, il les observa tour à tour.

« - On comptait peut être s’enfuir en me voyant ? » plaisanta Noam. « je commençais à croire que vous aviez quitté la ville. Ça fait des semaines que je vous avais pas vu toutes les deux. »

« - Oh mais c’est notre champion ! Noam Tanner ! » s’exclama une voix au bout d’une allée avant d’intercepter Noam.

L’inconvénient de ses maudites petites villes. Tout le monde se connaissaient et les commères ne perdait jamais leur temps. Il avait grandi avec alors une fois de plus, il s’en accommoderait même si ça l’agaçait toujours autant. Et dire que Charly, Jessie, Joyce, Aidan et Josh supportaient ça depuis toujours. C’était tout juste déconcertant. Comment faisaient ils pour ne pas craquer ? Un sourire forcé sur le visage, Noam resta silencieux une seconde face à Mme Helmsey, une ancienne institutrice qui l’avait torturé avec ses leçons de grammaire.

« - Je savais bien que tu reviendrais, espèce de petit garnement ! Et en plus, tu es devenu un homme ! »
« - Je l’étais avant de partir Madame Helmsey. » renchérit Noam.
« - Alors tu es au courant pour Charly. »
« - J’ai appris pour Caleb. » dévia-t-il facilement. Car il était évident pour Noam que ça n’était pas le point essentiel dont voulait parler sa vieille institutrice.
« - C’est triste. Elle est si jeune. Ça l’a dévasté, cette petite. Enfin heureusement maintenant que tu es rentrée, je suis persuadée qu’elle va retrouver un certain équilibre. »
« - Elle me semble aller plutôt bien. Je n’ai rien à voir là dedans- »
« - Allez mon garçon, ne me fait pas croire que tu as oublié qui elle est ! D’ailleurs, t’as entendu parlé de ce fiancé- »
« - Il est médecin et Charly vit sa vie comme elle l’entend- »
« - Donc tu es bien au courant. En tout cas, sache que moi… je l’apprécie pas du tout. Il est peut être mignon mais honnêtement, il est loin d’avoir tous tes talents lorsqu’il s’agit de faire rire ou enrager la petite Evans. »
« - Merci Madame Helmsey ! » rit doucement Noam, un sourire tendre aux lèvres. « Mais Charly n’est plus une petite fille. C’est une femme qui sait ce qu’elle veut. »
« - J’ai parié sur toi, Noam. Ne vas pas me faire perdre toute ma retraite ! » plaisanta l’institutrice avec un clin d’œil avant de s’éloigner en entendant son mari l’interpeller. « Je t’ai toujours à l’œil Tanner ! Fais attention ! » l’avertit son ancienne institutrice de l’autre bout du rayon.
« - Ravi de vous avoir revu Madame Helmsey ! » lança-t-il riant à moitié. C’était affolant. Non. A vrai dire, c’était terrifiant qu’on veuille à tout prix le pousser dans les bras de Charly. Pas que ça lui déplaisait. Il aimait tellement Charly. Elle lui manquait terriblement. Physiquement et émotionnellement. Juste le fait d’évoquer des souvenirs, voir une nouvelle fois un sourire embarrassé ou ces étoiles dans son regard, lui suffisait. La savoir en paix, une fois dans sa vie l’apaiserait. Seulement c’était des détails qu’il avait du mal à provoquer. Cela dit, il n’abandonnait pas d’y parvenir. Songeant à elle, ce sourire irrésistible s’étira sur son visage. Charly l’inspirait même après une traversée du désert pendant deux ans. C’est ainsi qu’il lui fallut plusieurs secondes de réaction en apercevant deux silhouettes qu’il croisait régulièrement près de chez lui.

« - Oui, je sais ce que c’est quand on débarque dans une ville comme ici. On est toujours débordés. » les excusèrent Noam.

Lui-même en étant de retour, avait été débordé un temps. Toutefois sa situation avait toujours été différente. Parce qu’il avait grandit ici. Qu’il savait quelles personnes étaient à fuir mais surtout parce qu’il ne laisserait personne dicté sa vie comme avait pu le tenter les Tanner tout au long de sa vie. A les regarder, des idées transitaient dans son esprit. Son regard s’accentua encore plus lorsqu’il entendit Maureen lui présenter Ellie. S’il comprenait sa gêne, car ça n’était jamais simple de débarquer dans une ville comme Hope Mills, il marqua un temps d’arrêt à ses propos sur le fait qu’il s’agissait de sa sœur.

« - Ravit de te rencontrer Ellie. » sourit il spontanément avant de tourner la tête vers Maureen. « Difficile à croire. » Son souffle était à peine audible mais il perçut bien que la jeune femme l’avait entendu. Noam s’y connaissait en mensonge. Sa vie en avait été un pendant 23 ans. Ainsi, la panique et la crainte dans les yeux de Maureen n’eut pas le temps de le tromper. Il enchaina alors plus doucement. « L’une de vous deux devrait se teindre les cheveux parce que les secrets ne font pas long feu ici. Surtout si vous ne tenez pas ce que la vérité vous explose au visage. »

C’était pas son genre de donner des leçons de morale mais il n’était pas stupide. Si lui avait découvert un détail entre elles, tout le monde en viendrait au moins à cette même conclusion. Il ne s’agissait qu’une question de temps. Hésitant l’espace d’une seconde, il réfléchit très vite. « Vous savez quoi ? je vous invite à prendre un café, un verre ou peu importe. On peut parler de ce qui vous tracasse ou sinan je vous raconterais tous les potins de la ville et Dieu sait qu’il y en a ! » ironisa Noam en songeant à Lynn qui un jour avait dit qu’elle devrait écrire tous les potins de la ville dans un livre. Il les observa alors toutes les deux, visiblement hésitantes.